La télé-réalité mérite-t-elle vraiment le terme de "réalité"?
Lorsque M6 diffuse la première émission de télé-réalité française, les producteurs mettent en avant le caractère authentique de l'émission. "Rien n'échappe aux 26 caméras de M6" s'exclame l'animateur de Loft Story, Benjamin Castaldi. Pour la première fois, la télévision propose des images prises sur le vif et diffusées simultanément. Néanmoins, plusieurs éléments viennent contredire ce caractère "réél" des programmes de télé-réalité…
Lorsque la première diffusion de Loft Story a lieu, les annonceurs la présentent comme une "fiction réelle interactive"; mais comment une fiction peut-elle être réelle? Le fait est que Loft Story filme la réalité...mais de manière contrôlée, ce qui lui vaut l'appellation paradoxale précédente! En effet, il y a 
tout d'abord les castings qui permettent aux producteurs de sélectionner des candidats, de 
la même façon qu'on sélectionne des comédiens pour le tournage d'une fiction. Ici aussi, la sélection est importante, n'importe qui ne peut pas convenir! Ainsi, on va choisir des personnages souvent proches de la caricature: Loana la "Bimbo", Steevy le "Gay", Laure la "bourgeoise", etc. Cette sélection filtre déjà la réalité...
De plus, il y a une forte scénarisation dans les émissions de real TV. En effet, les concepteurs se sont rapidemment rendus compte que les résumés quotidiens sombraient dans le banal et que le téléspectateur se lassait d'un spectacle aussi routinier. Très vite, il faut trouver une solution, c'est l'audience qui est en jeu! Les producteurs vont donc insister sur le facteur extraordinaire. Dès lors, on voit apparaître de nouvelles émissions enregistrées dans des lieux hors du commun: un château (Star Academy), une île paradisiaque (L'île de la tentation) ou encore une ferme (La ferme Célébrités) et un camp militaire (La première compagnie)...
Des règles sont également imposées aux candidats car on insiste sur le jeu. Il ne s’agit plus de filmer la réalité, mais un jeu avec des personnages réels. Les participants doivent ainsi respecter un scénario et des règles. Cela permet de séquentialiser le quotidien et de le rendre moins monotone. Ainsi, dans les émissions comme Popstar, Star Academy ou encore Koh Lanta, l'accent est mis sur la compétition. Dans Loft Story ou encore Les Colocataires, il s'agit de combler le néant du quotidien par des jeux hebdomadaires: préparation de soirées, déguisements, ateliers manuels... Les occupations des candidats ressemblent fortement à des caricatures de la vie sociale: on s'habille, on prend soin de son corps, on se maquille, on s'amuse... Ici encore, l'authenticité est mise en doute. Certes, les participants sont bien réels mais ce que l'on filme d'eux est complètement scénarisé. Il y a une obligation de se plier aux règles et de mettre en scène des scènes préprogrammées.
Face à cela, on remarque que la télé-réalité fait de plus en plus appel à de vrais acteurs pour participer à ses émissions car ils savent parfaitement s’adapter aux divers scénarios. C’est ainsi que la Première Compagnie reçoit comme participant l’acteur Jean-Pierre Castaldi ou encore l’ancienne comédienne du sitcom Hélène et les garçons : Hélène Rollès…
L’émission L’île de la tentation , dont le principe est de tester la fidélité de plusieurs couples, recourt également à des acteurs. Ainsi chaque année, peu de temps après la diffusion de l'émission, les magazines people nous dévoilent les dessous et les mensonges de cette émission. La plupart des couples participant à ce jeu ne le sont pas réellement mais ont accepté de jouer les amoureux contre une rémunération alléchante et un voyage dans une île paradisiaque…
Se pose aussi la question du montage, là encore, cet élément vient s'opposer à la notion de "réalité". Au départ, l'émission Loft Story, par exemple, était retransmise en direct, 24h sur 24 sur la chaîne câblée TPS et sur internet. Mais après quelques dérapages des candidats (...), les images sont retransmises de façon contrôlée. Désormais, la "réalité" que l'on transmet aux téléspectateurs est donc préalablement triée, choisie et montée... On remarquera d’ailleurs que la formule « différée » s’installe de plus en plus, de façon à surveiller davantage, à contrôler l’image et à fabriquer un scénario. Les tournages se produisent beaucoup à l’étranger de manière à ce que les montages soient justifiés…
Ainsi, une nouvelle question se pose : ne devrait-on pas envisager de renommer la télé-réalité ? Le professeur et sémiologue F. Jost, lui, propose la terminologie de « Télé-jeu de rôle », pourquoi pas ?...
(Source photos: http://images.google.fr)
/https%3A%2F%2Fassets.over-blog.com%2Ft%2Fcedistic%2Fcamera.png)
/http%3A%2F%2Fcoziol.canalblog.com%2Fimages%2Ft-pic_patient_matt.jpg)
/https%3A%2F%2Fprofilepics.canalblog.com%2Fprofilepics%2F6%2F3%2F63206.jpg)